Voici un billet plus personnel, que j’hésite à poster depuis un moment. Une interview d’Esperenza Spalding, une musicienne qui m’impressionne beaucoup par son talent, m’a décidé à le faire. Parlant des critiques et de la volonté de progresser, elle trouve des mots qui font sens pour moi (le lien figure à la fin de cet article.)
Je suis musicien (très amateur), et même si cette activité n’est plus mon loisir principal pour plein de raisons indépendantes de ma volonté, la musique continue de faire partie de ma vie au quotidien. Pourquoi l’aborder sur ce blog ? Je crois que comme toute activité artistique, il y a de nombreux points communs avec l’écriture. J’en reparlerai sans doute avec Harmonie, un roman que j’espère publier prochainement.
Certains lecteurs ou aspirants auteurs pourraient penser qu’une fois publié, le plus dur est fait. Il n’en est rien.
J’aurais plutôt tendance à dire que les vraies difficultés commencent ! Défendre son texte est loin d’être une entreprise facile. Une majorité de personne n’aura tout simplement ni le temps ni l’envie de vous lire. Certains vous soutiendront, et donneront plus rarement un avis positif. D’autres, de tous milieux, chercheront à vous décourager de continuer. Exactement comme c’est hélas le cas dans la musique. Ils savent (mieux que vous.) Et gardez-vous de mettre leur parole en doute !
Je souhaiterais parler de cette dernière catégorie. J’y reviens plus bas.
En un peu plus d’un an de « jeune auteur publié », j’ai eu droit à des réactions tournant aux blagues sur le livre et son titre (La Voyageuse d’Ayanar, le premier que j’ai à défendre) ; à des lecteurs sur salon qui n’osent pas vous regarder car c’est l’auteur d’à côté qu’ils viennent voir ; à une blogueuse embarrassée, néanmoins sympathique, abordée un peu trop rapidement (désolé !) ; à une libraire qui m’a conseillé Edilivres (véridique), ennuyée que je lui propose un exemplaire à titre de service presse, venant pourtant d’un vrai éditeur à compte d’éditeur qui se donne du mal pour donner leur chance à des auteurs francophones. Bref, à une indifférence générale sous plein de réactions maladroites (le fait d’un auteur maladroit aussi, sûrement.)
Et j’ai eu droit à des critiques. Dans certains cas, virulentes. Mon argument de faire des compromis afin d’être publié quand même et d’avancer malgré tout avec les moyens du bord a reçu un accueil assez brutal lors de discussions sur Internet. Que si je ne « livrais pas un travail parfait dès mon premier roman, ce serait foutu pour la suite. » (je caricature leurs propos, mais l’idée est là.) Une question de réputation, ce genre de choses…
D’autres ont fait preuve d’agacement pour la tournure imprévue lors d’une première conférence où je participai (critiques a posteriori. Là aussi, sur le net, c’est plus facile !) Un auteur n’a pas dissimulé sa déception quand je lui ai indiqué avoir mis une note et un mot encourageant sur son roman sur Babelio (note que je me suis senti obligé de modifier ensuite… Comprenez bien : malgré une note que j’estimais convenable, je lui faisais baisser ses statistiques. Vous êtes auteur ? Méfiez-vous surtout des auteurs !) Je pensais lui faire plaisir avec un encouragement, je le fais en général pour tous les auteurs francophones rencontrés que je lis… Bien m’en a pris !
En résumé, les bâtons dans les roues ne manquent pas. Il y a eu plein de fois où j’étais découragé d’écrire, je ne parvenais plus à y trouver un sens. Dans ces moments-là, je repense souvent à mon ancien groupe de musique, où au bout de plusieurs années d’effort, l’on m’a fait comprendre qu’il y avait des objectifs (ah ? Ce n’est pas juste un loisir ?) et que si je ne m’améliorais pas rapidement, il était inutile que je reste… (je ne suis pas resté, sans aucune rancune, mais je joue toujours !)
Je reviens à cette vidéo. Esperenza Spalding est surdouée, vraiment. Écoutez ses disques, regardez ses concerts. Je ne sais pas comment elle fait, alors quand j’ai du temps, je m’instruis avec ses interviews (en plus d’écouter sa musique.)
Parlant du regard des autres et des critiques, elle évoque ses années d’apprentissage, et le jeu lors de premières scènes. Que si quelqu’un prend le temps de vous critiquer, c’est un don qu’il faut savoir recevoir pour s’en servir ensuite. Elle parle notamment d’une anecdote dans un club à New York, où elle doit réagir face à l’agacement d’un autre musicien lors d’une jam, qui lui répond :
« Don’t get mad at me, you’re the one playing that crap ! »
Selon Esperenza, à certains moments, recevoir un bon coup de pied dans le derrière et devoir se retrouver embarrassé est important. Si quelqu’un s’énerve avec vous et s’occupe de votre cas (pour reprendre ses termes) afin d’être critique sur votre jeu, c’est un trésor rare. Si cette personne pensait que vous n’avez aucun potentiel, elle ne prendrait pas le temps de le faire.
Il en va probablement de même dans l’écriture, et plein d’autres activités artistiques.
À nous de transformer ces critiques en énergie positive, pour s’en resservir ! Je dois d’ailleurs réviser Harmonie pour l’étoffer et en tirer une meilleure substance. On verra bien !
Lien vers l’interview d’Esperenza Spalding (ce que je cite et m’efforce de traduire se situe environ entre 31′ et 35′, mais vous pouvez aussi tout écouter !)